Le comte de Chambord


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Nous avons à l’image du dernier héritier non-contesté, comme quelqu’un de rétrograde, bigot, vivant dans un autre âge. Pourtant la réalité est tout autre. Tout en respectant les principes qui ont fait la France, le comte de Chambord n’a pas cessé d’intervenir dans les débats politique, économique et social de son temps, donnant une idée précise de la royauté restaurée à ces concitoyens et aux prétendants de la branche d’Orléans, une base institutionnelle économique et sociale de la France.

I. Idées politiques économiques et sociales.

« Exclusion de tout arbitraire ; le règne et le respect des lois, l’honnête et le droit partout ; le pays sincèrement représenté, votant l’impôt ; et concourant à la fonction des lois, les dépenses sincèrement contrôlées, la propriété : la liberté individuelle et religieuses inviolables et sacrées : l’administration communale et départementale sagement et progressivement décentralisée, le libre accès pour tous aux honneurs et avantages sociaux : telles sont à mes yeux les véritables garanties d’un bon gouvernement ». Lettre au duc de Lévis, du 12 mars 1856.

Contrairement à ce que nous pouvons penser, le comte de Chambord ne voulait pas d’une royauté ancrée dans l’Ancien Régime, mais au XIXème siècle, la citation de dessus en est la preuve.

1. Le renouveau du légitimisme : jeune France.

En premier, lieu, le comte de Chambord s’inspira largement d’un mouvement légitimiste, nommé Jeune France, voulant tourner la page de l’Ancien Régime et de l’émigration, et prenant en compte des changements effectués depuis la fin du XVIIIème siècle. Elle prônait la représentativité politique, et la défense des libertés publiques fondamentales, de religion, d’opinion et d’expression, enfin la décentralisation de l’Etat.

Leurs idées ont été plus ou moins influencé par le légitimiste libéral et romantique, François-René Chateaubriand. Ces légitimistes « henriquinquisme » possèdent plusieurs journaux : L’Echo de la Jeune France, la gazette de France, et la Mode.

Ces ultra royalistes espèrent régénérer la monarchie avec le jeune, duc de Bordeaux qui n’a pas connu l’Ancien Régime et la Révolution.

De même, cette tendance politique s’inscrit en plein XIXème siècle romantique, épris d’esprit chevaleresque, d’une restauration de la religion, et de la condamnation de la société bourgeoise incarnée, par le régime de Louis-Philippe. Ce mouvement fut crée par l’abbé Antoine de Genoude, théoricien d’une monarchie librement consentie.

2. Esprit et institution de la monarchie chambordienne.

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1. Une monarchie nationale et légitime.

Bien qu’en tenant compte de ces critiques, il développe sa propre pensée politique.

Le comte de Chambord comprend que la royauté s’est peu à peu séparée de la patrie, depuis Louis XV, et surtout avec Waterloo. Il comprend que royalisme et patriotisme sont indissociables, surtout à partir de 1870, avec la défaite française. Il préfigure à cette date, le nationalisme intégral de Charles Maurras.

Ensuite, le comte de Chambord pose les bases de l’institution de la monarchie traditionnelle.

Après les échecs des 12 constitutions depuis la chute de la Royauté, la France connaît une instabilité politique. Le comte de Chambord pense que seule la monarchie légitime et traditionnelle peut permettre la stabilité et la continuité du pouvoir, et la garantie des libertés fondamentales telles de conscience, de religion, associatives, individuelles, d’enseignement et d’instruction.

2. Une monarchie chrétienne.

Cette monarchie, bien que donnant la liberté religieuse et de conscience sera chrétienne, basée sur les évangiles.

Parfois on me demande quel sera mon programme, il est bien simple. C’est l’Evangile tout pu, sans en retrancher un iota, car j’ai la conviction profonde que l’Evangile est le code du gouvernement tout aussi bien que celui des individus ».

Ce pendant, il ne tombe pas dans une théocratie, séparant bien la sphère spirituel et temporel :

Pleine liberté de l’Eglise dans les choses spirituelles, indépendante souveraine de l’Etat dans les choses temporelles, parfait accord et l’un et l’autre dans les questions mixtes » Lettre du 26 mars 1859 La Monarchie française.

3. Un roi arbitre et judiciaire.

Sa conception du roi est celui d’un arbitre, au dessus des classes et des partis,

« Si je tiens à préserver l’intégralité du principe monarchique, ce n’est pas pour exercer ne domination égoïste et absolue. Je veux une autorité tempérée. Mais je veux aussi une autorité respectée pour y puiser la force de m’élever au-dessus des exigences des partis, dans l’intérêt même du pays, et d’exercer un rôle de modérateur efficace et d’arbitre écouté ».

Il doit favoriser l’ascension sociale des plus méritants et ne plus être le premier parmi des nobles.

Les revendications de la Révolution française, l’égalité du droit, de l’impôt et aux fonctions publiques auraient été donc conservés par une constitution écrite si Le comte de Chambord avait régné.

La constitution aurait prévu un système bicamériste avec une chambre basse élue au suffrage populaire, et familial dit intégral, la chambre haute, nommée par le roi, qui aurait fait office de grand conseil, composée en partie par les intérêts économiques et sociaux : agriculteur, propriété, industrie commerce, main d-’ouvre et scientifiques ». Le gouvernement aurait été responsable devant le roi. La loi aurait été partagée entre l’exécutif et le législatif.

Pour ce qui est de la justice, les magistrats auraient été indépendants :

La justice est le fondement des Etats, et ceux qui la rendent au nom d’un prince, ont besoin, pour remplir dignement leur haute mission, d’un noble et sage indépendance. Rien de ce qui peut y porter atteinte ne saurait avoir mon approbation, et je juge comme vous la mesure dont vous parlez ».

« La France reviendrait à une saine décentralisation dans les communes, cantons et départements. Outre l’effet qu’elle permettrait de redonner des libertés aux français pour défendre leurs intérêts, de recentrer l’Etat dans les affaires régaliennes, elle permettrait aussi de former une élite locale, aux grandes affaires nationales. (Lettres du 22 janvier 1848, du 14 novembre 1862, et du 30 janvier 1865). »

Surtout préservons les classes populaires de joug tyrannique et de l’odieuse servitude de l’instruction obligatoire qui achèverait de ruiner l’autorité paternelle et d’effacer les dernières traces du respect dans la famille et dans l’État. (lettre du 30 janvier 1865).

« Je disais encore que la décentralisation sagement comprise et loyalement pratiquée, en multipliant et mettant à la portée de chacun les occasions d’être utile, et de se consacrer selon ses facultés à la gestion des intérêts communs, entretiendrait au sein de la société et dans les carrières ouvertes à tous, l’émulation du zèle, de l’intelligence, du dévouement ; que ce serait un puissant moyen de régler, d’organiser la démocratie qui gagne toujours du terrain, et de préserver ainsi l’ordre social des dangers dont elle le menace. » Lettre sur la décentralisation, 14 novembre 1862

3. Un programme économique et social avant-gardiste.

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Sur le plan économique et social, le comte de Chambord s’inscrit dans le courant catholique social qui donnera en 1881 « rerum novarum » de Léon XIII, sur la doctrine sociale de l’Eglise.

Sa pensée économique et sociale est développée dans deux lettres : Lettre sur l’agriculture, 1866 et Lettre aux ouvriers de 1865.

Pour ce qui est de l’agriculture le comte de Chambord avait des connaissances économiques assez classiques, prônant un protectionnisme agricole, ainsi que les analyses de Ricardo, considérant que la prospérité économique dépend de l’agriculture.

En ce qui concerne la question ouvrière, le comte de Chambord est assez avant-gardiste. Qui sait que nos ateliers nationaux de 1848 ont été voulu expérimenter par l’héritier de Saint-Louis dans ses domaines de Chambord ?

Il prône tout d’abord, la charité envers les ouvriers, l’association entre ouvriers et patrons sous surveillance de l’Etat, et ainsi une législation protégeant le prolétariat.

En résumé, droit d’association sous la surveillance de l’État, et avec le concours de cette multitude d’œuvres admirables, fruits précieux des vertus évangéliques, tels sont les principes qui semblent devoir servir efficacement à délier le nœud si compliqué de la question ouvrière.
Lettre aux ouvriers, 20 avril 1865

Enfin, sa fibre sociale se vit lors de la Commune de 1871. Non qu’il approuva la Commune elle-même qui aurait mis en France, un processus révolutionnaire, connu depuis 1789, mais il fut horrifié de la répression contre le peuple manipulé, selon lui, par les meneurs, alors qu’eux eut l’autorisation de s’exiler.